Abstention et reports font planer un doute sur le vote
Emmanuel Macron est-il sûr de l'emporter? L'abstention et le vote des déçus du premier tour créent des incertitudes.

La présence au second tour de la candidate du Front national n'a pas provoqué les imposants défilés de 2002. Et le front républicain des consignes de vote anti-FN s'est lézardé depuis. Des incertitudes pèsent donc sur les conditions du duel entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, dimanche. Le débat télévisé de mercredi pourrait ajouter à d'autres inconnues de ce second tour. Que feront les électeurs du premier tour dont les candidats ont été éliminés? Quelle sera la part de l'abstention? La mobilisation de l'électorat des deux qualifiés sera-t-elle forte, alors que le scrutin se déroulera en plein pont du 8 mai, jour férié en France?
Des stratégies qui divisent
«Les électeurs suivent peu les consignes de vote des personnalités et appareils politiques», note Bruno Cautres, politologue au Centre d'études de la vie politique française (Cevipof) de Sciences Po Paris. «Mais je ne sous-estime pas cependant le comportement des électeurs de Jean-Luc Mélenchon. Selon nos enquêtes, 60% d'entre eux iront voter au second tour.»
Le candidat de La France insoumise, qui a recueilli 19,5% des voix, a évidemment demandé à ses électeurs de ne pas voter pour Marine Le Pen. Mais il a aussi expliqué qu'on ne «lui tordrait pas le bras» pour glisser un bulletin de vote Macron. Lundi, il demandait au candidat d'En Marche! de faire un geste en direction de son électorat en renonçant à réformer le Code du travail. Car les Insoumis sont à la fois des antilibéraux et des souverainistes. Il ne veut donc pas dire comment il votera au second tour pour conserver l'unité de son mouvement avant les législatives. La moitié des Insoumis devraient cependant voter pour Emmanuel Macron. Tandis qu'un tiers s'abstiendrait et une minorité voterait pour Marine Le Pen. Pour les socialistes, le choix de voter pour le candidat d'En Marche! ne fait pas débat.
En revanche, à droite, du côté des électeurs de François Fillon (20% au premier tour), près d'un tiers est prêt à voter FN et autant à s'abstenir, quand plus de 40% disent qu'ils glisseront un bulletin Macron dans l'urne. Le ralliement de Nicolas Dupont-Aignan (4,9%, le 23 avril) à la candidate Marine Le Pen, qui lui propose le poste de premier ministre, va aussi provoquer des reports de voix incertains, car cette stratégie divise chez les partisans du souverainiste.
«Le plafond de verre»
Reste la question difficile de l'abstention. Et la probabilité, même faible, d'une élection de Marine Le Pen, jugée pourtant jusqu'ici impossible, en raison de ce qu'on appelle le plafond de verre, qui empêcherait la candidate de dépasser les 50%. «Ce plafond de verre existe encore. Mais pour combien de temps?» s'interroge Bruno Cautres. «Ce ne sera probablement pas lors de ce scrutin. Mais à chaque élection, le Front national progresse, attire de nouveaux profils d'électeurs et confirme son implantation territoriale. Le plus spectaculaire étant bien sûr l'ancrage dans les milieux populaires et les territoires du nord-est et du sud-est.»
Un dimanche de pont
Serge Galam, chercheur au CNRS et membre du Cevipof, expliquait dans un article publié par Libération qu'«il existe désormais la possibilité qu'avec, par exemple 41% d'intention de vote, la veille des élections, cela donne le lendemain 50,3% des exprimés». Cette probabilité est posée car tout dépendra du niveau d'abstention au second tour. Or de nombreuses circonstances pourraient favoriser ce scénario.
D'abord la date du second tour, un dimanche pris dans un week-end prolongé par le lundi 8 mai, jour férié en France. Par ailleurs, une partie des électeurs dont les candidats ont été éliminés au premier tour pourraient faire le choix de ne pas aller voter ou de voter blanc (un vote qui n'est pas pris en compte dans les exprimés). Par rejet des deux candidats, par indifférence, par le fait d'une banalisation du FN.
Pour l'heure, le niveau d'abstention se situe autour de 29%, soit un point de plus qu'en 2002. «L'abstention joue un rôle important. Mais dans les calculs de Serge Galan, il faudrait qu'elle soit très élevée pour permettre à Marine Le Pen de passer», commente Bruno Cauteres. «Mais surtout, plus l'abstention sera élevée, plus l'interprétation à donner de l'élection sera faible. Du score d'Emmanuel Macron, s'il est élu, dépendra aussi sa capacité à appliquer son programme et à négocier en meilleure position sa politique de relance de l'UE avec les partenaires européens.»
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