Quand arrêter la pilule devient la base du féminisme

Conseillère en symptothermie, Valentina Salonna encourage les femmes à s’émanciper en cultivant un féminisme particulier.
«Bonjour, je viens vous voir car j’ai décidé d’arrêter la pilule. Je ne veux plus imposer des hormones artificielles à mon corps.» Nous ne sommes pas chez le gynécologue, mais dans le cabinet lausannois de Valentina Salonna, yogathérapeute et conseillère en symptothermie. «La symptothermie, un mot trouvé par une sage-femme suisse, Claire Michelin, est une méthode naturelle d’observation du cycle, permettant de distinguer les périodes de fertilité», explique la Vaudoise, avec un accent italien chantant. En quoi la symptothermie varie-t-elle de la méthode ogino-klaus, basée sur le calcul des jours? «En plus de la prise de température matinale, la femme prélève son élixir avec ses doigts (ndlr: comprenez glaire cervicale) et palpe son col de l’utérus, qui est dur et fermé pendant les périodes d’infertilité et souple pendant les périodes fertiles.»
Ces mesures peuvent être compilées dans une application smartphone, accompagnant la femme, le temps qu’elle sache interpréter son cycle toute seule. En cas de doute, les femmes peuvent envoyer une photo de leur «élixir» à la thérapeuthe par message WhatsApp.
Le stérilet, une «excision symbolique»
Valentina Salonna a réuni quelques-unes de ses patientes autour d’une tisane «spécial femmes» pour l’occasion. Elles racontent comment l’arrêt de la pilule constitue le point de départ pour le féminisme qu’elles défendent. Comment, disent-elles, prendre conscience de sa puissance si l’on ne reconnaît pas ce qui fait la spécificité du corps des femmes, à savoir le cycle menstruel? Refuser de déléguer la gestion de sa contraception à la médecine et être capable de savoir quand on est fertile ou pas constitue, pour elles, le premier pas de l’émancipation.
Et le stérilet en cuivre, qui connaît un regain de popularité chez les femmes n’ayant pas encore eu d’enfants et désirant une contraception non hormonale? Ouvrant de grands yeux horrifiés, Valentina Salonna le compare à une «excision symbolique», bien «pire que la pilule»: «Oui, le corps peut à nouveau ovuler, mais le stérilet provoque une inflammation constante de l’utérus. Et si une fécondation a quand même lieu, il provoque une fausse couche, sans même que l’on puisse la différencier des règles normales.»
Inclure les hommes pour un féminisme apaisé
«Les femmes viennent d’abord me voir pour parler de contraception, poursuit Valentina Salonna. Puis on aborde peu à peu la connaissance de soi, l’indépendance professionnelle, la relation avec les hommes, la volonté, ou non, d’avoir des enfants, etc. Le cycle n’est pas uniquement relié à la procréation, mais à l’énergie et la puissance féminine.» Le but de s’intéresser à son cycle? Que la femme «vive sa légende, en harmonie avec elle-même et avec l’homme», sourit la thérapeute.
Mariana Marietan, en formation pour devenir enseignante de yoga, souligne l’importance qu’a joué son conjoint dans son cheminement: «Quand j’ai arrêté la pilule, mon copain ne m’a pas demandé pourquoi. Ça lui semblait légitime de vouloir en finir avec les hormones. C’était précieux de me sentir soutenue, ça m’a permis d’éclore.» La thérapeute souligne que la réaction du compagnon est déterminante dans l’apprentissage de la symptothermie: «L’homme est impliqué dans l’observation du corps de sa compagne, et devra tenir compte autant qu’elle de ses jours de fertilité, si le couple ne veut pas d’enfants.»
Le féminisme qu’elles défendent toutes doit «tenir compte des hommes». Helena Pibiri, thérapeute en orthobionomie et enseignante d’aviron et de hula-hoop, donne son avis sur les débats féministes qui ont enflammé l’actualité ces derniers mois: «On peut faire beaucoup plus en sortant de ces prises de tête, en reconnaissant et en respectant simplement les hommes et les femmes dans ce qu’ils sont. Le militantisme est un formidable levier, comme le mouvement #metoo, qui permet de changer les choses. Mais je trouve que les débats féministes restent dans un dogme et mènent à une guerre des sexes.»
Mariana Marietan résume: «C’est en apprenant, dans l’amour, la beauté du fonctionnement de son corps que l’on trouve la force, la confiance et la puissance pour émerger. Une fois épanouies, nous pouvons apporter la réelle force féminine dont le monde a besoin aujourd’hui.»